Quelle est la durée des droits d’auteur en France ?

Quelle est la durée des droits d’auteur en France ?

Lorsqu’une œuvre originale est créée, que ce soit un livre, une chanson, un film ou une peinture, elle est protégée par le droit d’auteur. Mais savez-vous pendant combien de temps s’applique cette protection intellectuelle en France ? Découvrons ensemble les règles régissant la durée des droits d’auteur et ce qu’il advient des œuvres lorsque cette période prend fin.

Définition : Le droit d’auteur est l’ensemble des droits dont dispose un auteur sur ses œuvres de l’esprit originales. Il se compose du droit moral (lien perpétuel entre l’auteur et son œuvre) et des droits patrimoniaux (droits économiques permettant à l’auteur de tirer une rémunération de l’utilisation de ses créations).

La protection de base : 70 ans après la mort de l’auteur

En France, le code de la propriété intellectuelle stipule que les droits d’auteur, qui comprennent à la fois les droits patrimoniaux et le droit moral, perdurent pendant 70 ans après la mort de l’auteur. Cette durée, adoptée dans l’Union Européenne en 1993, vise à protéger l’auteur de son vivant ainsi que deux générations d’héritiers. Ainsi, que vous soyez écrivain, compositeur ou peintre, votre œuvre reste protégée par la loi durant sept décennies après votre décès, quelle que soit sa date de publication, même posthume.

Prenons l’exemple d’un roman publié de votre vivant. Pendant toute votre vie, vous bénéficiez des droits patrimoniaux qui vous permettent de contrôler la reproduction (droit de copie) et la représentation (communication au public) de votre œuvre. Vous pouvez ainsi autoriser ou interdire son adaptation au cinéma, sa traduction, etc. À votre mort, ces droits sont transmis à vos ayants droit (conjoint, enfants…) pour une durée de 70 ans.

Bon à savoir : Si vous n’avez pas d’ayant droit au moment de votre décès, vos droits d’auteur seront gérés par l’État jusqu’à leur expiration et l’entrée de l’œuvre dans le domaine public.

Le droit moral : une protection perpétuelle

Contrairement aux droits patrimoniaux, le droit moral associé à une œuvre est perpétuel. Il protège le lien entre l’auteur et sa création au-delà de la mort. Ce droit assure notamment :

  • Le respect de l’œuvre (s’opposer à sa dénaturation)
  • La paternité (exiger que le nom de l’auteur soit mentionné)
  • Le droit de divulgation (choisir si et quand l’œuvre sera dévoilée au public)

Même lorsque les droits patrimoniaux ont expiré, personne ne peut s’approprier votre œuvre ou la modifier sans l’accord de vos ayants droit. Le droit moral constitue ainsi un rempart contre la dénaturation de votre travail artistique ou littéraire, et ce pour l’éternité.

Les exceptions à la règle des 70 ans

Il existe quelques cas particuliers où la durée des droits d’auteur diffère de la protection standard de 70 ans post-mortem :

  • Pour les œuvres de collaboration (créées par plusieurs auteurs), les droits courent jusqu’à 70 ans après la mort du dernier co-auteur survivant. Pour les œuvres audiovisuelles, c’est la date de décès du dernier co-auteur parmi le scénariste, le dialoguiste, le réalisateur et le compositeur de musique.
  • Concernant les œuvres anonymes ou sous pseudonyme, la durée est de 70 ans à partir de la publication, sauf si l’identité de l’auteur est révélée.
  • Les œuvres posthumes bénéficient d’une protection de 25 ans à compter de la publication, dans la limite des 70 ans après la mort de l’auteur.

A noter : Certains pays, notamment les États-Unis et le Royaume-Uni, appliquent un système de « copyright » avec des durées parfois différentes de celles du droit d’auteur français. De plus, la durée de protection pour les droits voisins des interprètes et producteurs est généralement de 50 à 70 ans après la première interprétation ou publication.

Et après ? L’entrée dans le domaine public

Une fois la durée des droits patrimoniaux écoulée, l’œuvre entre dans le domaine public. Cela signifie que n’importe qui peut désormais la reproduire, la représenter ou l’adapter librement sans demander d’autorisation ni verser de rémunération. C’est pourquoi vous pouvez trouver gratuitement en ligne les grands classiques de la littérature comme Victor Hugo ou Molière, assister à des représentations libres des pièces de théâtre de Racine, ou écouter sans contrainte les compositions de Mozart.

Chaque 1er janvier, de nouvelles œuvres rejoignent le domaine public. En 2022, ce sont par exemple celles de l’écrivain Marcel Proust, du poète Jean Cocteau ou du compositeur Camille Saint-Saëns, tous trois décédés en 1922, qui sont devenues libres de droits.

Néanmoins, n’oubliez pas que même dans le domaine public, le droit moral perdure. Il est donc toujours obligatoire de citer l’auteur original et de respecter l’intégrité de son travail. Imprimer votre nom sur un tableau de Monet serait ainsi considéré comme une violation du droit moral et donc une contrefaçon.

Par ailleurs, certains usages d’œuvres protégées restent autorisés selon des exceptions au droit d’auteur précisément encadrées : courte citation, parodie, copie privée, usages pédagogiques limités, etc.

La durée des droits d’auteur vise à trouver un équilibre entre la protection des créateurs et l’accès du public à la culture. Pendant 70 ans, elle permet aux auteurs et à leurs ayants droit de contrôler l’utilisation de l’œuvre et d’en tirer une juste rémunération en accordant des autorisations et en percevant des droits via des sociétés de gestion collective (SACEM, SACD, etc.). Puis, en rejoignant le domaine public, l’œuvre appartient à tous et contribue à enrichir notre patrimoine commun. Un système qui se veut profitable à la fois aux artistes et à la société.

Bon à savoir : Les auteurs ont la possibilité de renoncer volontairement à leur droit d’auteur pour verser leur œuvre dans le domaine public de leur vivant. Une démarche rare mais qui peut être motivée par des convictions personnelles de partage de la connaissance.

Il faut garder à l’esprit que prouver sa paternité sur une œuvre en cas de litige est primordial. Pour cela, les créateurs disposent de plusieurs moyens comme le dépôt auprès d’une société de gestion collective, l’envoi d’une enveloppe Soleau à soi-même ou encore l’horodatage numérique certifié. Des précautions utiles pour faire valoir ses droits le moment venu.

Par ailleurs, la réglementation européenne a récemment évolué en matière de droit d’auteur et de droits voisins, notamment pour la diffusion des œuvres en ligne. La directive de 2019 vise à assurer une meilleure protection et rémunération des auteurs et artistes face aux géants du web, tout en créant de nouvelles exceptions en faveur de l’éducation, de la recherche et de la préservation du patrimoine.

Vous l’aurez compris, le droit d’auteur est un domaine vaste et parfois complexe qui cherche à établir un équilibre délicat entre de multiples enjeux. Que vous soyez auteur, héritier ou simple utilisateur d’œuvres de l’esprit, il est essentiel d’en comprendre les principes de base et les évolutions.

Et n’oublions pas que derrière chaque création se cache un auteur qui a consacré son temps, son énergie et son talent pour nous offrir un livre, une chanson, un film qui nous fait rêver, réfléchir ou vibrer. Respecter son droit moral et lui permettre de vivre de son art est indispensable pour favoriser une création riche et diversifiée, et continuer à faire rayonner notre culture !